Peur de mourir et peur de la mort

Dire que « avoir peur de la mort » est normal, ce serait très catégorique. Toutefois, la majeure partie de l’humanité étant imprégnée de cette peur, nous pouvons dire que c’est naturel d’avoir peur de la mort. Bien que cela fasse partie d’une étape de la vie, avant tout, c’est l’inconnu qui domine à son sujet. Le degré de la peur de la mort dépendrait de trois éléments importants de notre vie :
Les expériences des premières périodes de notre enfance dans nos relations aux autres,
La vision que nous avons de la vie et le sens de notre existence et bien évidement de la vie après la mort, et
La vie que nous menons au quotidien.

Sur le premier point, l’attachement excessif de la personne à ses proches la rend dépendante des autres. Elle a peur de perdre ses chers et surtout de ne pas pouvoir faire face au vide causé par leur disparition. Le fait que son bonheur est conditionné par la présence de ceux qui lui sont chers, elle vit dans la peur de les perdre. Cette peur est souvent liée aux relations que la personne a pu avoir avec ses parents dans son plus jeune âge. Un enfant qui s’est senti abandonné par un de ces parents aura plus de difficulté à accepter de perdre ses chers par peur d’être à nouveau abandonné. Certains enfants ayant vécu ce type de situation comme injuste, ils verraient derrière la mort, quelque chose d’injuste. Pour d’autres, ne pouvant pas contrôler cette étape de la vie, le sentiment d'impuissance face à la mort est perçu comme une menace.

Sur le deuxième point, comme la mort est un mystère et inaccessible à la logique et à la compréhension de l’être humain, les principes au sujet de la vie après la mort les plus courantes viennent des religions et des traditions depuis la nuit des temps. A notre époque, les gens qui ont rejeté les religions, expliquent la vie après la mort selon leur perception personnelle souvent divergente les unes par rapport aux autres. Par ailleurs, nous savons que pour les matérialistes purs et durs, la vie s’arrête après la mort. Pour ces derniers, toutes explications concernant la vie après la vie terrestre ne sont que des vaines imaginations des êtres humains pour se rassurer.

Avec toutes ces divergences de vision et de compréhension, la majorité des gens est perdue et n’a pas une vision claire de la vie après la mort. Cela augmente l’angoisse et la peur sur la suite de la vie qui est voilée aux yeux des hommes. Sur ce deuxième point, plusieurs questions peuvent nous aider à réfléchir et trouver une vision claire de la vie après la mort. Quel est le sens de l’existence ? Que veut dire la vie ? Quelle réponse me conviendrait mieux ? Où vais-je chercher des réponses à mes questions ? Des réponses basées sur des croyances archaïques ou encore des réponses inventées par des êtres humains ou encore d’autres sources ? Est-ce que la mort peut être la fin de tout ? Voilà, tout un ensemble de questions et de réflexions qui devraient éclaircir le sens de notre vie au quotidien.

Notre approche de la vie au quotidien sera bien évidement différente si nous avons une autre vision de la vie : « tous les hommes ont été créés pour travailler à l'établissement et à l'amélioration croissante de la civilisation. »* Notre état intérieur et notre attitude seront différents si nous croyons que la vie après la mort physique est la « vie véritable », que la vraie nature de l’homme est spirituelle et que cette vie sur terre n’est qu’une étape d’une longue vie. La qualité de notre vie au quotidien est amplement conditionnée par la vision que nous avons du monde et de l’existence.

Quand l’enfant est dans le ventre de sa mère est inconscient de l’existence d’un autre monde. Pourtant, il est invité à développer tous ses organes pour bénéficier de ce monde avec les yeux pour voir, les oreilles pour entendre, la bouche pour manger,… De la même façon, dans ce monde, l’être humain bien qu’inconscient de la nature et de la réalité de l’autre monde, est invité à développer les qualités et ses capacités spirituelles pour utiliser ensuite après la mort. Une telle vision est une source d’espoir et de grande douceur pour la vie que nous menons et conditionne sa qualité. Avec une telle approche, on voudra que « Que chaque matin soit meilleur que la veille et que chaque lendemain plus riche que le jour précédent… »* Ainsi, nous profitons pleinement de la vie et nous développons nos qualités et nos capacités grâce aux actions nobles que nous réalisons au quotidien. La peur de la mort laisse sa place à l’amour de la vie.

Shahryar Issakhany

*) Bahá’u’lláh, fondateur de la Foi bahá’ie

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